Pétrole entre pourritures: la connexion canadienne
Vous avez sans doute déjà entendu parler du scandale du programme Pétrole contre Nourriture de l’ONU. Mais saviez-vous que le nom de plusieurs entreprises et personnalités canadiennes a été associé à l’affaire ?
· L’influent businessman canadien MAURICE STRONG, mentor réputé du premier ministre Paul Martin Jr., a récemment perdu son poste de conseiller spécial auprès du secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, à cause de sa possible implication dans le scandale.
· Par contre, jusqu’à présent l’ex-fonctionnaire canadienne LOUISE FRÉCHETTE a pu conserver son poste de vice-secrétaire générale, qui fait d’elle la no.2 de l’ONU, malgré le fait qu’elle a participé à des tentatives d’étouffer l’affaire.
· Signe que d’importants intérêts canadiens pourraient être en jeu, le directeur exécutif de la commission d’enquête de l’ONU sur le scandale, REID MORDEN, fut directeur du Service Canadien de Renseignement de Sécurité [SCRS], de 1987 à 1991.
· En effet, certains des acteurs du scandale nous permettent de remonter tout droit jusqu’aux dirigeants de la puissante multinationale canadienne POWER CORPORATION contrôlée par la famille Desmarais.
Faut-il s’en étonner ? Après tout, depuis des décennies le Canada a énormément investi dans les Nations Unies pour donner du prestige à son image de marque sur la scène internationale. D’ailleurs, plusieurs ont peut-être déjà oublié que Paul Martin Jr. avait lui-même accepté un poste à l’ONU, en juillet 2003, quelques mois à peine avant d’accéder au poste de premier ministre canadien. (1)
M. Martin Jr. s’était alors retrouvé à la tête de la Commission sur le développement et le secteur privé, une initiative onusienne consacrée à promouvoir le développement économique dans le Tiers-Monde, dit-on. Maintenant que l’ONU est plongé un incroyable pétrin, l’engagement pro-onusien du Canada pourrait bien se retourner contre lui.
Quand tombe le masque de l’hypocrisie humanitaro-onusienne
Crée par le Conseil de sécurité de l’ONU, le programme Pétrole contre nourriture exista de 1997 à 2003, jusqu’à la chute de Saddam Hussein. Durant ces sept années, 248 compagnies de 61 pays différents achetèrent 3.4 milliards barils de pétrole brut irakien. On sait aujourd’hui que ce programme de 64 milliards$ a servi, non pas à apaiser les souffrances du peuple irakien, mais plutôt à enrichir les dirigeants irakiens ainsi que des hommes d’affaires, des bureaucrates onusiens et des politiciens de dizaines et dizaines de pays différents.
C’est la presse irakienne qui avait lancé l’affaire en publiant, en janvier 2004, une liste de 270 personnalités qui auraient reçu du régime de Saddam Hussein des “coupon? représentant des barils de pétrole irakiens. On y retrouvait notamment l’ex-ministre de l’intérieur français Charles Pasqua, l’ex-présidente indonésienne Megawati Sukarnoputri, le politicien néo-fasciste russe Vladimir Jirinovski et le fils du président libanais Emile Lahoud.
Par la suite, différentes enquêtes tenues par des sous-comités du Sénat et du Congrès Américains purent établir que le régime de Saddam Hussein avait profité du programme Pétrole contre nourriture pour siphonner des milliards$ en revenus illégaux en imposant, d’une part, des commissions illicites aux fournisseurs de nourriture, de médicaments et d’autres produits et, d’autre part, en ajoutant des surtaxes illégales sur les ventes de pétrole. (2)
Depuis, l’ONU a institué sa propre commission d’enquête, dirigé par Paul Volcker, ex-président de la Réserve Fédérale Américaine. L’affaire représente sans contredit le plus grave scandale de toute l’histoire des Nations Unies. M. Kofi Annan, le no.1 de l’ONU, est lui-même sur la sellette parce que la firme d’inspection suisse Cotecna qui employait son fils, Kojo, avait décrochée un contrat avec l’ONU dans le cadre de Pétrole contre nourriture. Or, Cotecna n’aurait jamais dû obtenir ce contrat puisque, à l’époque, son président faisait l’objet d’une enquête criminelle en Suisse pour avoir offert un pot-de-vin à la famille de l’ancienne première ministre du Pakistan, Mme Benazir Bhutto.(3)
Benon Sevan, celui-là même qui fut le directeur du programme du début jusqu’à la fin, est tombé en disgrâce en février dernier lorsque la commission Volcker l’accusa d’avoir “ sérieusement miné l’intégrité des Nations Unie? en profitant de sa position, de 1998 à 2001, pour solliciter aux dirigeants irakiens des allocations de pétrole pour le compte d’une société pétrolière panaméenne.
Ce ne serait là que la pointe de l’iceberg. Selon M. Richard Goldstone, un des deux adjoints de Volcker, environ la moitié des 4 500 compagnies ayant participé au programme auraient payé des pots-de-vin, gonflé leurs factures ou perçu des commissions occultes. (4) Certains, comme le député Emad Geldah, n’ont pas hésité à dire que les bakchichs étaient obligatoires pour quiconque voulait faire affaire avec le régime irakien.
On connaît maintenant le nom de certaines compagnies canadiennes dont l’implication dans le programme soulève aujourd’hui plusieurs questions : Oilexco, Cordex Petroleums Inc., Sasktachewan Wheat Pool et Limpex Trading.
C’est pourquoi en mai dernier, le Parti Conservateur et le Nouveau Parti démocratique demandaient la tenue d’une enquête publique afin de déterminer si des Canadiens ont participé à des transactions illégales dans le cadre du programme Pétrole contre Nourriture. Mais le ministre des affaires étrangères, M. Pierre Pettigrew, répondit qu’il préférait attendre les résultats de l’enquête de l’ONU avant de se prononcer. (5)
Cependant en France, l’affaire est considérée suffisamment sérieuse pour que le juge d’instruction Philippe Courroye contacte les différentes agences de renseignement (DST, DCRG, DGSE) pour leur demander de lui acheminer tous les éléments en leur possession sur le programme Pétrole contre nourriture. (6)
Le 26 avril 2005, coup de théâtre : M. Bernard Guillet, conseiller diplomatique de M. Pasqua jusqu’en 2001, est arrêté et placé en garde à vue sous des accusations de recel d’abus de biens sociaux et de trafic d'influence aggravé. Durant son interrogatoire, Guillet confirme au juge Courroye qu’un haut responsable du régime irakien, M. Tarek Aziz, avait offert une allocation de plusieurs millions de barils de pétrole à Pasqua. Mais ce dernier peut néanmoins dormir tranquille puisque son poste de sénateur lui garanti l’immunité en matière de poursuites pénales.
La solidarité entre Canadiens
Administratrice en chef du bureau de Kofi Annan, Mme Louise Fréchette fut la première à occuper le poste de vice-secrétaire générale de l’ONU, créé en 1998. Auparavant, Mme Fréchette avait représenté le Canada à l’ONU de 1992 à 1994. Puis, de novembre 1994 à juin 1995, elle fut sous-ministre des finances et travailla directement sous les ordres de Paul Martin Jr. Elle fut ensuite nommée sous-ministre à la défense, fonction qu’elle occupait toujours lorsque le gouvernement de M. Jean Chrétien mit abruptement fin aux travaux de la commission d’enquête sur les atrocités commises par des soldats canadiens en Somalie, en 1997.
En ce qui concerne Pétrole contre nourriture, les enquêteurs de la commission Volcker apprirent que Mme Fréchette avait directement contribué à étouffer l’affaire lorsqu’ils interrogèrent M. Dileep Nair, le directeur du Bureau des Services de Contrôles Internes de l’ONU qui mena 55 vérifications de comptes et consacra trois rapports sommaires sur le programme irakien. (7)
Durant plusieurs mois, en 2000, M. Nair avait insisté auprès des responsables onusiens pour obtenir l’autorisation d’acheminer les résultats de ses efforts de vérification au Conseil de sécurité de l’ONU, qui devait, en théorie, assurer la supervision du programme Pétrole contre nourriture. M. Nair déclara aux enquêteurs que la question avait été tranchée par un coup de téléphone de Mme Fréchette, dans lequel cette dernière opposa une fin de non-recevoir à sa proposition.
Suite à cela, M. Nair renonça à faire suivre les rapports de ses contrôleurs au Conseil de sécurité. Le graissage de pattes pu donc continuer en toute tranquillité. Lorsqu’elle fut interrogée à ce sujet lors d’une conférence de presse, Mme Fréchette affirma ne pas se souvenir de ladite conversation entre elle et M. Nair. Puis, elle ajouta : “ Mais je suis plutôt prête à accepter le compte rendu de M. Nair de la conversation “. Bref, elle ne nie pas le rôle qu’on lui attribue.
Curieusement, bien que le premier rapport d’étape de la commission Volcker mentionne à douze reprises Mme Fréchette via son titre de vice-secrétaire générale de l’ONU, son nom n’apparaît nul part dans le document. Lorsque les journalistes lui demandèrent pourquoi le nom de Mme Fréchette fut passé sous silence, M. Reid Morden, directeur exécutif de la commission, déclina de répondre. A-t-on cherché à étouffer le rôle que Mme Fréchette a joué à étouffé l’affaire ?
Une semaine plus tard, la commission Volcker annonça qu’elle corrigera cette omission en incluant le nom de complet de Mme Fréchette dans le rapport. Les responsables de la commission reconnurent du même souffle que M. Morden et Mme Fréchette entretiennent une “relation professionnelle de longue dat? depuis 30 ans ! (8)
N’est-ce pas mignon ? On a même pu apprendre que du temps où il était sous-ministre aux affaires étrangères, M. Morden avait été le supérieur de Mme Fréchette l’époque où elle représentait le Canada à l’ONU. On découvrit aussi que M. Morden avait discuté avec Mme Fréchette de la perspective de travailler pour la commission Volcker avant d’accepter le poste de directeur exécutif. (9) Voilà de quoi nous rassurer sur l’intégrité et l’impartialité de la commission Volcker… pas vrai ?
(voir partie 2)
Sources :
(1) Canadian Press, “Paul Martin accepts UN commission post, sees no conflict with Liberal rac?, July 25 2003.
(2) CNS News, “UN Oil for Food: Conflicts of Interest and Institutional Corruption", by Jeff Johnson and Kathleen Rhodes, December 15 2004.
(3) CNN, “Annan : ‘Hell no,’ I won’t go", by Richard Roth and Phil Hirschkorn, March 30, 2005.
(4) Libération, “Une vaste entreprise de corruption à l’ONU", par Philippe Grangereau, 11 août 2005.
(5) La Presse, “ Pétrole contre nourriture—Les partis de l'opposition demandent une enquête", par Marc Thibodeau, 22 mai 2005.
(6) Le Monde, “La ‘dérive corruptive’ du programme Pétrole contre nourriture", par Gérard Davet et Fabrice Lhomme, 4 juin 2005.
(7) FOX News, “Annan's #2 Blocks Oil-for-Food Scrutiny", March 2 2005.
(8) FOX News, “Volcker Panel to Correct Frechette Omission", March 8 2005.
(9) Ottawa Sun, “UN scandal inquiry has Frechette questioned", by Greg Weston, March 31 2005.
· L’influent businessman canadien MAURICE STRONG, mentor réputé du premier ministre Paul Martin Jr., a récemment perdu son poste de conseiller spécial auprès du secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, à cause de sa possible implication dans le scandale.
· Par contre, jusqu’à présent l’ex-fonctionnaire canadienne LOUISE FRÉCHETTE a pu conserver son poste de vice-secrétaire générale, qui fait d’elle la no.2 de l’ONU, malgré le fait qu’elle a participé à des tentatives d’étouffer l’affaire.
· Signe que d’importants intérêts canadiens pourraient être en jeu, le directeur exécutif de la commission d’enquête de l’ONU sur le scandale, REID MORDEN, fut directeur du Service Canadien de Renseignement de Sécurité [SCRS], de 1987 à 1991.
· En effet, certains des acteurs du scandale nous permettent de remonter tout droit jusqu’aux dirigeants de la puissante multinationale canadienne POWER CORPORATION contrôlée par la famille Desmarais.
Faut-il s’en étonner ? Après tout, depuis des décennies le Canada a énormément investi dans les Nations Unies pour donner du prestige à son image de marque sur la scène internationale. D’ailleurs, plusieurs ont peut-être déjà oublié que Paul Martin Jr. avait lui-même accepté un poste à l’ONU, en juillet 2003, quelques mois à peine avant d’accéder au poste de premier ministre canadien. (1)
M. Martin Jr. s’était alors retrouvé à la tête de la Commission sur le développement et le secteur privé, une initiative onusienne consacrée à promouvoir le développement économique dans le Tiers-Monde, dit-on. Maintenant que l’ONU est plongé un incroyable pétrin, l’engagement pro-onusien du Canada pourrait bien se retourner contre lui.
Quand tombe le masque de l’hypocrisie humanitaro-onusienne
Crée par le Conseil de sécurité de l’ONU, le programme Pétrole contre nourriture exista de 1997 à 2003, jusqu’à la chute de Saddam Hussein. Durant ces sept années, 248 compagnies de 61 pays différents achetèrent 3.4 milliards barils de pétrole brut irakien. On sait aujourd’hui que ce programme de 64 milliards$ a servi, non pas à apaiser les souffrances du peuple irakien, mais plutôt à enrichir les dirigeants irakiens ainsi que des hommes d’affaires, des bureaucrates onusiens et des politiciens de dizaines et dizaines de pays différents.
C’est la presse irakienne qui avait lancé l’affaire en publiant, en janvier 2004, une liste de 270 personnalités qui auraient reçu du régime de Saddam Hussein des “coupon? représentant des barils de pétrole irakiens. On y retrouvait notamment l’ex-ministre de l’intérieur français Charles Pasqua, l’ex-présidente indonésienne Megawati Sukarnoputri, le politicien néo-fasciste russe Vladimir Jirinovski et le fils du président libanais Emile Lahoud.
Par la suite, différentes enquêtes tenues par des sous-comités du Sénat et du Congrès Américains purent établir que le régime de Saddam Hussein avait profité du programme Pétrole contre nourriture pour siphonner des milliards$ en revenus illégaux en imposant, d’une part, des commissions illicites aux fournisseurs de nourriture, de médicaments et d’autres produits et, d’autre part, en ajoutant des surtaxes illégales sur les ventes de pétrole. (2)
Depuis, l’ONU a institué sa propre commission d’enquête, dirigé par Paul Volcker, ex-président de la Réserve Fédérale Américaine. L’affaire représente sans contredit le plus grave scandale de toute l’histoire des Nations Unies. M. Kofi Annan, le no.1 de l’ONU, est lui-même sur la sellette parce que la firme d’inspection suisse Cotecna qui employait son fils, Kojo, avait décrochée un contrat avec l’ONU dans le cadre de Pétrole contre nourriture. Or, Cotecna n’aurait jamais dû obtenir ce contrat puisque, à l’époque, son président faisait l’objet d’une enquête criminelle en Suisse pour avoir offert un pot-de-vin à la famille de l’ancienne première ministre du Pakistan, Mme Benazir Bhutto.(3)
Benon Sevan, celui-là même qui fut le directeur du programme du début jusqu’à la fin, est tombé en disgrâce en février dernier lorsque la commission Volcker l’accusa d’avoir “ sérieusement miné l’intégrité des Nations Unie? en profitant de sa position, de 1998 à 2001, pour solliciter aux dirigeants irakiens des allocations de pétrole pour le compte d’une société pétrolière panaméenne.
Ce ne serait là que la pointe de l’iceberg. Selon M. Richard Goldstone, un des deux adjoints de Volcker, environ la moitié des 4 500 compagnies ayant participé au programme auraient payé des pots-de-vin, gonflé leurs factures ou perçu des commissions occultes. (4) Certains, comme le député Emad Geldah, n’ont pas hésité à dire que les bakchichs étaient obligatoires pour quiconque voulait faire affaire avec le régime irakien.
On connaît maintenant le nom de certaines compagnies canadiennes dont l’implication dans le programme soulève aujourd’hui plusieurs questions : Oilexco, Cordex Petroleums Inc., Sasktachewan Wheat Pool et Limpex Trading.
C’est pourquoi en mai dernier, le Parti Conservateur et le Nouveau Parti démocratique demandaient la tenue d’une enquête publique afin de déterminer si des Canadiens ont participé à des transactions illégales dans le cadre du programme Pétrole contre Nourriture. Mais le ministre des affaires étrangères, M. Pierre Pettigrew, répondit qu’il préférait attendre les résultats de l’enquête de l’ONU avant de se prononcer. (5)
Cependant en France, l’affaire est considérée suffisamment sérieuse pour que le juge d’instruction Philippe Courroye contacte les différentes agences de renseignement (DST, DCRG, DGSE) pour leur demander de lui acheminer tous les éléments en leur possession sur le programme Pétrole contre nourriture. (6)
Le 26 avril 2005, coup de théâtre : M. Bernard Guillet, conseiller diplomatique de M. Pasqua jusqu’en 2001, est arrêté et placé en garde à vue sous des accusations de recel d’abus de biens sociaux et de trafic d'influence aggravé. Durant son interrogatoire, Guillet confirme au juge Courroye qu’un haut responsable du régime irakien, M. Tarek Aziz, avait offert une allocation de plusieurs millions de barils de pétrole à Pasqua. Mais ce dernier peut néanmoins dormir tranquille puisque son poste de sénateur lui garanti l’immunité en matière de poursuites pénales.
La solidarité entre Canadiens
Administratrice en chef du bureau de Kofi Annan, Mme Louise Fréchette fut la première à occuper le poste de vice-secrétaire générale de l’ONU, créé en 1998. Auparavant, Mme Fréchette avait représenté le Canada à l’ONU de 1992 à 1994. Puis, de novembre 1994 à juin 1995, elle fut sous-ministre des finances et travailla directement sous les ordres de Paul Martin Jr. Elle fut ensuite nommée sous-ministre à la défense, fonction qu’elle occupait toujours lorsque le gouvernement de M. Jean Chrétien mit abruptement fin aux travaux de la commission d’enquête sur les atrocités commises par des soldats canadiens en Somalie, en 1997.
En ce qui concerne Pétrole contre nourriture, les enquêteurs de la commission Volcker apprirent que Mme Fréchette avait directement contribué à étouffer l’affaire lorsqu’ils interrogèrent M. Dileep Nair, le directeur du Bureau des Services de Contrôles Internes de l’ONU qui mena 55 vérifications de comptes et consacra trois rapports sommaires sur le programme irakien. (7)
Durant plusieurs mois, en 2000, M. Nair avait insisté auprès des responsables onusiens pour obtenir l’autorisation d’acheminer les résultats de ses efforts de vérification au Conseil de sécurité de l’ONU, qui devait, en théorie, assurer la supervision du programme Pétrole contre nourriture. M. Nair déclara aux enquêteurs que la question avait été tranchée par un coup de téléphone de Mme Fréchette, dans lequel cette dernière opposa une fin de non-recevoir à sa proposition.
Suite à cela, M. Nair renonça à faire suivre les rapports de ses contrôleurs au Conseil de sécurité. Le graissage de pattes pu donc continuer en toute tranquillité. Lorsqu’elle fut interrogée à ce sujet lors d’une conférence de presse, Mme Fréchette affirma ne pas se souvenir de ladite conversation entre elle et M. Nair. Puis, elle ajouta : “ Mais je suis plutôt prête à accepter le compte rendu de M. Nair de la conversation “. Bref, elle ne nie pas le rôle qu’on lui attribue.
Curieusement, bien que le premier rapport d’étape de la commission Volcker mentionne à douze reprises Mme Fréchette via son titre de vice-secrétaire générale de l’ONU, son nom n’apparaît nul part dans le document. Lorsque les journalistes lui demandèrent pourquoi le nom de Mme Fréchette fut passé sous silence, M. Reid Morden, directeur exécutif de la commission, déclina de répondre. A-t-on cherché à étouffer le rôle que Mme Fréchette a joué à étouffé l’affaire ?
Une semaine plus tard, la commission Volcker annonça qu’elle corrigera cette omission en incluant le nom de complet de Mme Fréchette dans le rapport. Les responsables de la commission reconnurent du même souffle que M. Morden et Mme Fréchette entretiennent une “relation professionnelle de longue dat? depuis 30 ans ! (8)
N’est-ce pas mignon ? On a même pu apprendre que du temps où il était sous-ministre aux affaires étrangères, M. Morden avait été le supérieur de Mme Fréchette l’époque où elle représentait le Canada à l’ONU. On découvrit aussi que M. Morden avait discuté avec Mme Fréchette de la perspective de travailler pour la commission Volcker avant d’accepter le poste de directeur exécutif. (9) Voilà de quoi nous rassurer sur l’intégrité et l’impartialité de la commission Volcker… pas vrai ?
(voir partie 2)
Sources :
(1) Canadian Press, “Paul Martin accepts UN commission post, sees no conflict with Liberal rac?, July 25 2003.
(2) CNS News, “UN Oil for Food: Conflicts of Interest and Institutional Corruption", by Jeff Johnson and Kathleen Rhodes, December 15 2004.
(3) CNN, “Annan : ‘Hell no,’ I won’t go", by Richard Roth and Phil Hirschkorn, March 30, 2005.
(4) Libération, “Une vaste entreprise de corruption à l’ONU", par Philippe Grangereau, 11 août 2005.
(5) La Presse, “ Pétrole contre nourriture—Les partis de l'opposition demandent une enquête", par Marc Thibodeau, 22 mai 2005.
(6) Le Monde, “La ‘dérive corruptive’ du programme Pétrole contre nourriture", par Gérard Davet et Fabrice Lhomme, 4 juin 2005.
(7) FOX News, “Annan's #2 Blocks Oil-for-Food Scrutiny", March 2 2005.
(8) FOX News, “Volcker Panel to Correct Frechette Omission", March 8 2005.
(9) Ottawa Sun, “UN scandal inquiry has Frechette questioned", by Greg Weston, March 31 2005.