Warren Kinsella, dans le rôle du lobbyiste de lindustrie chimique
Dossier Warren Kinsella -partie 5
(précédent)
Au cours des quinze dernières années, Warren Kinsella a aidé une ribambelle de politiciens à conquérir les faveurs de l’électorat. Une fois que ceux-ci accèdent au pouvoir, M. Kinsella fait comme de nombreux organisateurs et conseillers politiques proches du nouveau gouvernement : il se recycle dans le lobbying auprès de ces mêmes politiciens qui lui sont redevables pour ses loyaux services de « spin doctor ».
Autrement dit, M. Kinsella-le-lobbyiste monnaye ses entrées auprès des dirigeants qu’il a contribué à installer au pouvoir. Avec pour résultat qu’on assiste à une pratique qui s’assimile à une forme de trafic d’influence qui, sans être forcément illégale, constitue néanmoins une façon de faire fortement questionnable sur le plan éthique.
Question d’offrir une certaine transparence, la loi oblige tous les lobbyistes à s’inscrire dans le Registre public des lobbyistes et d’y divulguer certaines informations générales sur leurs activités, notamment le nom de leur client, les sujets particuliers qui sont d’intérêt pour leur client (programmes, législation, etc.) et les institutions gouvernementales visées qui feront l’objet de lobbying.
Une recherche sur le site internet du Registre public des lobbyistes indique que Warren Kinsella a représenté les intérêts d’une vingtaine d’entreprises privées auprès de diverses instances gouvernementales fédérales entre 1996 et 2002.
Le Registre indique entre autres que M. Kinsella avait représenté cinq clients différents (Chin Radio TV International, le club de baseball des Blue Jays de Toronto, United Airlines, Dorling Kindersley Canada Ltd, Micheline North America) auprès du ministère des Travaux publics, avec lequel il avait eu amplement l’occasion de se familiariser, de 1993 à 1996.
De plus, M. Kinsella a également représenté les mêmes clients auprès du cabinet du premier ministre, qui était présidé à l’époque par son gourou politique et ami, Jean Chrétien. Qui pourrait être mieux placé qu’un ancien adjoint spécial du premier ministre pour avoir l’oreille du cabinet du premier ministre ? Avec un accès aussi privilégié au plus hauts échelons du pouvoir, les tarifs de M. Kinsella ne devaient pas être donnés. Notons aussi que le Registre révèle que les activités de lobbying de M. Kinsella ont amené ce dernier à s’adresser au Bureau du Conseil privé, qui relève directement du premier ministre canadien, à neuf reprises.
Puis, lorsqu’il s’impliqua dans la course à la succession de M. Jean Chrétien à la tête des libéraux fédéraux, le lobbying de M. Kinsella devint sujet à controverse. Ainsi, pendant qu’il soutenait la candidature de M. Allan Rock, alors ministre de l’Industrie, M. Kinsella faisait également du lobbying auprès du même ministère de l’Industrie pour le compte de quatre entreprises différentes (La Brasserie Labatt, Competition Policy Group, Micheline North America, United Airlines).
Le risque de conflit d’intérêt que présentaient les deux chapeaux que coiffait alors M. Kinsella aurait pourtant dû sauter aux yeux. Si les compagnies obtenaient gain de cause auprès du ministère, les adversaires de M. Allan Rock auraient pu embarrasser ce dernier en l’accusant d’avoir favorisé des compagnies qui avaient acheté les services de celui qui était alors son principal stratège politique. C’est ainsi qu’en mars 2002, la controverse a eu raison de lui et M. Kinsella dû se retirer de l’équipe supportant la candidature de M. Rock. (33)
Par contre, il faut dire que cette pratique douteuse n’était pas particulière à M. Kinsella. En juin 2002, dans une plainte adressée à M. Howard Wilson, alors conseiller en éthique du premier ministre, l’organisme Democracy Watch avait répertorié plusieurs autres situations similaires à celles de M. Kinsella qui étaient tout aussi questionnables la sienne. En fait, on peut même aller jusqu’à dire sans crainte de se tromper qu’il s’agit d’un phénomène généralisé à la classe politique qui ne se limite nullement aux libéraux fédéraux. (34)
Selon le registre des lobbyistes de l’Ontario, Warren Kinsella n’avait jamais exercé d’activités de lobbying auprès du gouvernement ontarien lorsque les libéraux siégeaient dans l’opposition à Queens Park. Toutefois, après que M. Kinsella eut aidé les libéraux de M. Dalton McGuinty à remporter les élections de novembre 2003, la situation changea du tout au tout.
Une recherche dans le registre des lobbyistes révèle qu’à partir de ce moment-là, M. Kinsella a représenté pas moins de 13 entreprises privées auprès de différentes instances gouvernementales de la province. D’ailleurs, notons que, pratiquement à chaque coup, le cabinet du premier ministre McGuinty figura sur la liste des institutions qui sont sollicitées par ses activités de lobbying.
Lorsque, à l’automne 2004, la ministre de l’Environnement, Mme Leona Dombrowsky, déposa son projet de loi intitulé « Loi sur la protection de l’environnement » (ou Bill 133), le lobby industriel fit naturellement appel aux services de Warren Kinsella. Le Bill 133 proposait d’accroître les pouvoirs des inspecteurs en environnement, en leur permettant d’imposer sur le champ une amende maximale de 100 000$ à toute compagnie responsable du déversement de matières susceptible de contaminer l’environnement.
Warren Kinsella fut donc engagé par un regroupement appelé « Coalition for a Sustainable Environment » (« Coalition pour un environnement durable »). Ne vous fiez pas au nom : il s’agit d’un leurre. « C’est un groupe industriel composé de certains des plus gros pollueurs du pays », a déclarée la critique néo-démocrate Marilyn Churley au sujet de cette coalition qu’elle n’hésita pas à qualifier d’« Orwellienne ». (35)
En effet, la Coalition que représentait M. Kinsella regroupait notamment l’Association des producteurs de produits chimique du Canada, l’Institut canadien de produits pétroliers, l’Association des producteurs d’acier, l’Association de l’industrie du plastique, l’Association de fabricants de véhicules du Canada, l’Association du ciment du Canada, l’Association ontarienne de l’administration des déchets, etc.
Le commentateur environnementaliste Colin Isaacs décrivit ainsi l’approche de la « Coalition pour un environnement durable » dans le débat entourant le Bill 133 : « Aucun effort pour essayer de présenter des alternatives ou pour traiter des vrais problèmes. Juste une approche vieux-jeu de couler-le-projet-de-loi-pour-qu’on-puisse-revenir-à-nos-pratiques-polluantes. »(36)
Le 23 mars 2005, à peine une semaine après s’être inscrit au registre des lobbyiste, Warren Kinsella assista à une réunion du cabinet des ministres du gouvernement de M. McGuinty. Deux semaines plus tard, lorsque la présence de M. Kinsella fut dévoilée dans les médias, les libéraux ontariens se retrouvèrent plongé dans un profond embarras. (37)
Quelques jours plus tôt avant que cette information ne fasse surface, l’opposition néo-démocrate accusait déjà le gouvernement McGuinty de chercher à tuer le projet de loi sur la protection de l’environnement. Au lieu de soumettre le Bill 133 devant l’assemblée législative pour qu’il soit débattu, le gouvernement McGuinty annonçait plutôt sa décision de l’envoyer devant un comité parlementaire, ce qui fut interprété par l’opposition comme une manœuvre destinée à envoyer le projet de loi aux oubliettes.
Maintenant que Warren Kinsella est dans le portrait, le geste du cabinet de McGuinty prit une nouvelle dimension. Selon l’opposition, le lobbyiste et ami des libéraux, qui était alors payé par le lobby industriel pour mettre du plomb dans l’aile du Bill 133, voire procéder à sa liquidation pure et simple, était le cerveau derrière cette manœuvre déguisée des libéraux. Un député de l’opposition est même allé jusqu’à prétendre que M. Kinsella avait davantage de pouvoir que la ministre de l’Environnement du gouvernement.
M. Dalton McGuinty fut donc obligé de se lever durant la période des questions pour défendre l’intégrité de son gouvernement. Il confirma alors que M. Kinsella avait bel et bien livré une présentation orale aux membres du cabinet, mais ajouta que le lobbyiste n’avait jamais abordé, ni de près ni de loin, la question du bill 133. M. McGuinty opposa toutefois une fin de non-recevoir à la demande de l’opposition de divulguer à l’assemblée législative une copie du procès-verbal de la réunion de cabinet du 23 mars 2005 afin de dissiper les craintes d’apparence de conflit d’intérêt.
La controverse disparue lorsque le Bill 133 fut adopté tel quel deux mois plus tard. Néanmoins, durant cet épisode, l’ancien punk rocker de Calgary fut décrit à maintes reprises comme étant le lobbyiste de l’industrie chimique dans les grands journaux et lord des débats parlementaires à Queens Park. Cette révélation bouleversa au moins un des fans de M. Kinsella, un dénommé Nar.
Sur son blog, Nar expliqua son admiration pour M. Kinsella en écrivant que ce dernier arrivait à maintenir une « éthique punk rock » qui était de nature à le rassurer quant au fait qu’il existerait « encore des gens dans le jeu politique que je considère comme faisant parti des ‘bons gars’ ». Pour cette raison, Nar confessa avoir de la difficulté à avaler que M. Kinsella se soit mis au service du grand lobby industriel pour venir à bout d’un projet de loi destiné à protéger l’environnement. « Dis-moi que pas c’est vrai, Warren ! », supplie Nar sur son blog. (38)
La réponse de M. Kinsella ne tenait que dans une seule phrase : « Je ne commente jamais les questions relatives à mes clients, et je ne suis pas sur le point de le faire. ». Évidemment, ce n’est pas Warren-le-punk qui parle ici. En fait, on croirait plutôt entendre Warren-le-businessman. C’est le client qui paye, alors c’est le client qui décide. Et s’il y a quelques beaux dollars à se mettre dans les poches, alors au diable l’« éthique punk rock » !
L’anti-racisme de Warren Kinsella : deux poids, deux mesures ?
Sources :
(33) The Canadian Press, “Liberal insiders on edge over new conflict rules for leadership candidates”, by Jim Brown, April 4, 2002.
(34) Media Release, « Democracy Watch Files Ethics Complaints Against Lobbyists, Calls For Effective Enforcement Of New Rules », June 17 2002.
(35) Toronto Star, “Has spills bill sprung a leak?”, by Ian Urquhart, April 9, 2005.
(36) EcoLog Week, “Bill 133 provides textbook illustration of how not to make environmental laws”, by Colin Isaacs, June 27 2005.
(37) The Canadian Press, “Liberals under fire after chemical industry lobbyist attends cabinet meeting”, by Greg Bonnell, April 7, 2005.
(38) http://thedailynar.blogspot.com/2005_04_01_thedailynar_archive.html
(précédent)
Au cours des quinze dernières années, Warren Kinsella a aidé une ribambelle de politiciens à conquérir les faveurs de l’électorat. Une fois que ceux-ci accèdent au pouvoir, M. Kinsella fait comme de nombreux organisateurs et conseillers politiques proches du nouveau gouvernement : il se recycle dans le lobbying auprès de ces mêmes politiciens qui lui sont redevables pour ses loyaux services de « spin doctor ».
Autrement dit, M. Kinsella-le-lobbyiste monnaye ses entrées auprès des dirigeants qu’il a contribué à installer au pouvoir. Avec pour résultat qu’on assiste à une pratique qui s’assimile à une forme de trafic d’influence qui, sans être forcément illégale, constitue néanmoins une façon de faire fortement questionnable sur le plan éthique.
Question d’offrir une certaine transparence, la loi oblige tous les lobbyistes à s’inscrire dans le Registre public des lobbyistes et d’y divulguer certaines informations générales sur leurs activités, notamment le nom de leur client, les sujets particuliers qui sont d’intérêt pour leur client (programmes, législation, etc.) et les institutions gouvernementales visées qui feront l’objet de lobbying.
Une recherche sur le site internet du Registre public des lobbyistes indique que Warren Kinsella a représenté les intérêts d’une vingtaine d’entreprises privées auprès de diverses instances gouvernementales fédérales entre 1996 et 2002.
Le Registre indique entre autres que M. Kinsella avait représenté cinq clients différents (Chin Radio TV International, le club de baseball des Blue Jays de Toronto, United Airlines, Dorling Kindersley Canada Ltd, Micheline North America) auprès du ministère des Travaux publics, avec lequel il avait eu amplement l’occasion de se familiariser, de 1993 à 1996.
De plus, M. Kinsella a également représenté les mêmes clients auprès du cabinet du premier ministre, qui était présidé à l’époque par son gourou politique et ami, Jean Chrétien. Qui pourrait être mieux placé qu’un ancien adjoint spécial du premier ministre pour avoir l’oreille du cabinet du premier ministre ? Avec un accès aussi privilégié au plus hauts échelons du pouvoir, les tarifs de M. Kinsella ne devaient pas être donnés. Notons aussi que le Registre révèle que les activités de lobbying de M. Kinsella ont amené ce dernier à s’adresser au Bureau du Conseil privé, qui relève directement du premier ministre canadien, à neuf reprises.
Puis, lorsqu’il s’impliqua dans la course à la succession de M. Jean Chrétien à la tête des libéraux fédéraux, le lobbying de M. Kinsella devint sujet à controverse. Ainsi, pendant qu’il soutenait la candidature de M. Allan Rock, alors ministre de l’Industrie, M. Kinsella faisait également du lobbying auprès du même ministère de l’Industrie pour le compte de quatre entreprises différentes (La Brasserie Labatt, Competition Policy Group, Micheline North America, United Airlines).
Le risque de conflit d’intérêt que présentaient les deux chapeaux que coiffait alors M. Kinsella aurait pourtant dû sauter aux yeux. Si les compagnies obtenaient gain de cause auprès du ministère, les adversaires de M. Allan Rock auraient pu embarrasser ce dernier en l’accusant d’avoir favorisé des compagnies qui avaient acheté les services de celui qui était alors son principal stratège politique. C’est ainsi qu’en mars 2002, la controverse a eu raison de lui et M. Kinsella dû se retirer de l’équipe supportant la candidature de M. Rock. (33)
Par contre, il faut dire que cette pratique douteuse n’était pas particulière à M. Kinsella. En juin 2002, dans une plainte adressée à M. Howard Wilson, alors conseiller en éthique du premier ministre, l’organisme Democracy Watch avait répertorié plusieurs autres situations similaires à celles de M. Kinsella qui étaient tout aussi questionnables la sienne. En fait, on peut même aller jusqu’à dire sans crainte de se tromper qu’il s’agit d’un phénomène généralisé à la classe politique qui ne se limite nullement aux libéraux fédéraux. (34)
Selon le registre des lobbyistes de l’Ontario, Warren Kinsella n’avait jamais exercé d’activités de lobbying auprès du gouvernement ontarien lorsque les libéraux siégeaient dans l’opposition à Queens Park. Toutefois, après que M. Kinsella eut aidé les libéraux de M. Dalton McGuinty à remporter les élections de novembre 2003, la situation changea du tout au tout.
Une recherche dans le registre des lobbyistes révèle qu’à partir de ce moment-là, M. Kinsella a représenté pas moins de 13 entreprises privées auprès de différentes instances gouvernementales de la province. D’ailleurs, notons que, pratiquement à chaque coup, le cabinet du premier ministre McGuinty figura sur la liste des institutions qui sont sollicitées par ses activités de lobbying.
Lorsque, à l’automne 2004, la ministre de l’Environnement, Mme Leona Dombrowsky, déposa son projet de loi intitulé « Loi sur la protection de l’environnement » (ou Bill 133), le lobby industriel fit naturellement appel aux services de Warren Kinsella. Le Bill 133 proposait d’accroître les pouvoirs des inspecteurs en environnement, en leur permettant d’imposer sur le champ une amende maximale de 100 000$ à toute compagnie responsable du déversement de matières susceptible de contaminer l’environnement.
Warren Kinsella fut donc engagé par un regroupement appelé « Coalition for a Sustainable Environment » (« Coalition pour un environnement durable »). Ne vous fiez pas au nom : il s’agit d’un leurre. « C’est un groupe industriel composé de certains des plus gros pollueurs du pays », a déclarée la critique néo-démocrate Marilyn Churley au sujet de cette coalition qu’elle n’hésita pas à qualifier d’« Orwellienne ». (35)
En effet, la Coalition que représentait M. Kinsella regroupait notamment l’Association des producteurs de produits chimique du Canada, l’Institut canadien de produits pétroliers, l’Association des producteurs d’acier, l’Association de l’industrie du plastique, l’Association de fabricants de véhicules du Canada, l’Association du ciment du Canada, l’Association ontarienne de l’administration des déchets, etc.
Le commentateur environnementaliste Colin Isaacs décrivit ainsi l’approche de la « Coalition pour un environnement durable » dans le débat entourant le Bill 133 : « Aucun effort pour essayer de présenter des alternatives ou pour traiter des vrais problèmes. Juste une approche vieux-jeu de couler-le-projet-de-loi-pour-qu’on-puisse-revenir-à-nos-pratiques-polluantes. »(36)
Le 23 mars 2005, à peine une semaine après s’être inscrit au registre des lobbyiste, Warren Kinsella assista à une réunion du cabinet des ministres du gouvernement de M. McGuinty. Deux semaines plus tard, lorsque la présence de M. Kinsella fut dévoilée dans les médias, les libéraux ontariens se retrouvèrent plongé dans un profond embarras. (37)
Quelques jours plus tôt avant que cette information ne fasse surface, l’opposition néo-démocrate accusait déjà le gouvernement McGuinty de chercher à tuer le projet de loi sur la protection de l’environnement. Au lieu de soumettre le Bill 133 devant l’assemblée législative pour qu’il soit débattu, le gouvernement McGuinty annonçait plutôt sa décision de l’envoyer devant un comité parlementaire, ce qui fut interprété par l’opposition comme une manœuvre destinée à envoyer le projet de loi aux oubliettes.
Maintenant que Warren Kinsella est dans le portrait, le geste du cabinet de McGuinty prit une nouvelle dimension. Selon l’opposition, le lobbyiste et ami des libéraux, qui était alors payé par le lobby industriel pour mettre du plomb dans l’aile du Bill 133, voire procéder à sa liquidation pure et simple, était le cerveau derrière cette manœuvre déguisée des libéraux. Un député de l’opposition est même allé jusqu’à prétendre que M. Kinsella avait davantage de pouvoir que la ministre de l’Environnement du gouvernement.
M. Dalton McGuinty fut donc obligé de se lever durant la période des questions pour défendre l’intégrité de son gouvernement. Il confirma alors que M. Kinsella avait bel et bien livré une présentation orale aux membres du cabinet, mais ajouta que le lobbyiste n’avait jamais abordé, ni de près ni de loin, la question du bill 133. M. McGuinty opposa toutefois une fin de non-recevoir à la demande de l’opposition de divulguer à l’assemblée législative une copie du procès-verbal de la réunion de cabinet du 23 mars 2005 afin de dissiper les craintes d’apparence de conflit d’intérêt.
La controverse disparue lorsque le Bill 133 fut adopté tel quel deux mois plus tard. Néanmoins, durant cet épisode, l’ancien punk rocker de Calgary fut décrit à maintes reprises comme étant le lobbyiste de l’industrie chimique dans les grands journaux et lord des débats parlementaires à Queens Park. Cette révélation bouleversa au moins un des fans de M. Kinsella, un dénommé Nar.
Sur son blog, Nar expliqua son admiration pour M. Kinsella en écrivant que ce dernier arrivait à maintenir une « éthique punk rock » qui était de nature à le rassurer quant au fait qu’il existerait « encore des gens dans le jeu politique que je considère comme faisant parti des ‘bons gars’ ». Pour cette raison, Nar confessa avoir de la difficulté à avaler que M. Kinsella se soit mis au service du grand lobby industriel pour venir à bout d’un projet de loi destiné à protéger l’environnement. « Dis-moi que pas c’est vrai, Warren ! », supplie Nar sur son blog. (38)
La réponse de M. Kinsella ne tenait que dans une seule phrase : « Je ne commente jamais les questions relatives à mes clients, et je ne suis pas sur le point de le faire. ». Évidemment, ce n’est pas Warren-le-punk qui parle ici. En fait, on croirait plutôt entendre Warren-le-businessman. C’est le client qui paye, alors c’est le client qui décide. Et s’il y a quelques beaux dollars à se mettre dans les poches, alors au diable l’« éthique punk rock » !
L’anti-racisme de Warren Kinsella : deux poids, deux mesures ?
Sources :
(33) The Canadian Press, “Liberal insiders on edge over new conflict rules for leadership candidates”, by Jim Brown, April 4, 2002.
(34) Media Release, « Democracy Watch Files Ethics Complaints Against Lobbyists, Calls For Effective Enforcement Of New Rules », June 17 2002.
(35) Toronto Star, “Has spills bill sprung a leak?”, by Ian Urquhart, April 9, 2005.
(36) EcoLog Week, “Bill 133 provides textbook illustration of how not to make environmental laws”, by Colin Isaacs, June 27 2005.
(37) The Canadian Press, “Liberals under fire after chemical industry lobbyist attends cabinet meeting”, by Greg Bonnell, April 7, 2005.
(38) http://thedailynar.blogspot.com/2005_04_01_thedailynar_archive.html