Élections fédérales 2006: Petit malaise au comité électoral de Gilles Duceppe -2e partie

Publié le par Bureau des Affaires Louches

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Cachez ce Pantaloni que

Duceppe ne saurait voir!

Tel un chewing gum tenace qui refuse de décoller de la semelle d’un soulier, M. Pantaloni semble incapable d’envisager de recommencer une nouvelle vie loin de la politique. Ainsi, même après sa condamnation, en 1998, M. Pantaloni continua à offrir ses services d’organisateur aux différentes composantes politiques du mouvement souverainiste québécois, chez qui il ne semble pas avoir eu de difficultés à trouver preneur.

Encore tout récemment, on apprenait de la bouche de M. Pierre-Luc Paquette, un des hommes de confiance de M. Duceppe, que M. Pantaloni avait collaboré à la campagne de M. André Boisclair lors de la récente course à la chefferie du Parti québécois.

De plus, M. Paquette a aussi révélé que M. Pantaloni travaille présentement à la campagne du successeur de M. Boulerice dans le comté de Sainte-Marie/Saint-Jacques, M. Martin Lemay, un ancien conseiller municipal du parti Vision Montréal.

Dans ce contexte, quoi de plus normal que de voir cet organisateur politique aguerri aboutir au sein du comité électoral du Bloc ? Or, le moment ne pouvait être plus mal choisi, car le Bloc entend bien faire campagne sur le thème de l’intégrité en politique. Et ce n’est évidemment pas avec un tel personnage dans ses rangs que le Bloc pourra faire honneur au slogan qu’il avait mis de l’avant durant les élections de juin 2004, « un parti propre au Québec »…

Contacté par le quotidien La Presse, qui voulait en savoir plus sur les motifs de sa présence à la réunion du dimanche 27 novembre 2005 du comité électoral de M. Duceppe, M. Pantaloni semblait à court d’explications. « J’étais là par erreur, je n’avais pas d’affaires là », déclara-t-il sur un ton repentant.

« Ils voulaient mon avis sur la sortie du vote dans une élection en hiver », a expliqué M. Pantaloni, qui travaille à la ville de Montréal depuis 1982. « Je n’ai pas de poste dans l’organisation, je suis un bénévole, je ne suis pas payé. Je ne peux pas occuper de poste, être dans un cabinet politique, même si j’ai payé ma dette à la société », a-t-il précisé. « Je ne devais pas être à cette réunion, il y a quelqu’un qui a commis une erreur. Je ne croyais pas qu’il s’agissait d’une réunion du comité électoral. M. Duceppe ne savait pas que j'étais là… »

Comprenant que c’est l’image de marque de son parti qui en dépend, M. Duceppe fut rapide à réagir à la controverse. « Il n’est pas dans l’organisation », a-t-il insisté lors d’une conférence de presse tenue trois jours plus tard, le 30 novembre. « Il n’est pas dans le comité électoral. J’ai été surpris de le voir et dès dimanche après-midi, j’ai demandé qu’il ne soit plus présent à aucune des assemblées. Il n’a jamais travaillé pour moi, il ne fait pas parti du comité électoral. Il n’a pas d'affaire là ; il n’y sera pas ni de près, ni de loin. »

MM. Pantaloni et Duceppe s’entendent donc sur un point : le monsieur n’avait pas d’affaire là. Et pourtant, il y était. Ces explications opaques ont de quoi laisser plutôt perplexe. M. Pantaloni ne s’est tout de même pas retrouvé là par une bête erreur de téléportation ! Il a forcément fallut qu’il soit invité par une personne membre de l’organisation bloquiste qui souhaitait le voir impliqué dans la campagne.

Mais donc qui a eu l’idée saugrenue d’inviter Jean-Yves Pantaloni à assister à cette réunion du comité électoral bloquiste ?

« Je ne le sais pas », a commencé par répondre M. Duceppe. « J’enquête sur ça pour voir. Ce n’était pas moi personnellement, c’est une personne qui était présente à ce comité électoral-là qui avait pris sur elle-même de l’inviter. C'est une erreur et dès dimanche, je suis sorti de cette réunion et j’ai dit: ‘on prend des mesures, je ne veux pas qu’il soit là’. »


Faites ce que je dis…
…pas ce que je fais

Plus tard durant la journée du 30 novembre, M. Duceppe a précisé que c’était « un militant de bonne foi » qui était responsable de la présence de l’organisateur indésirable. Le chef bloquiste refusa toutefois d’en dire davantage et refusa de dévoiler l’identité de ce mystérieux militant. « C’est un militant de la base qui n’est ni un de mes adjoints, ni quelqu’un qui a un poste d’élu au Bloc », a indiqué M. Duceppe. (9)

Bien entendu, les libéraux fédéraux ne se sont pas fait prier pour faire les gorges chaudes de cette affaire. Ainsi, le 30 novembre 2005, l’aile québécoise du Parti libéral du Canada (PLC) diffusait un communiqué de presse, intitulé sarcastiquement « Invité par erreur ?!? », dans lequel il est allégué que M. Pantaloni « gravite maintenant dans la garde rapprochée de Gilles Duceppe ». (10)

M. Denis Coderre, ex-ministre fédéral et député du comté de Bourassa, fut d’ailleurs le premier politicien libéral qui chercha à embarrasser publiquement le Bloc avec cette histoire. « Il est ironique que ceux qui salissent des réputations depuis des mois s’associent maintenant avec cet organisateur du Parti Conservateur, du Parti Québécois et maintenant du Bloc condamné pour ces graves actes répréhensibles », lança M. Coderre

(À peine quelques semaines plus tôt, M. Coderre avait d’ailleurs menacé le Bloc et son chef de poursuite pour libelle diffamatoire après que ceux-ci eurent distribué un dépliant électoral, intitulé « Scandale des commandites : La route de l’argent », dans lequel figurait la photo du député du comté de Bourassa).

Dans un tel contexte, il n’y a donc rien d’étonnant à ce que M. Coderre s’en donne à cœur joie en tournant en dérision l’ignorance auto-proclamée du chef bloquiste relativement à la présence de M. Pantaloni. « M. Duceppe espère-t-il sérieusement nous faire croire qu’il n’est pas au courant de qui assiste aux réunions du comité électoral du parti dont il est le chef et auxquelles lui-même assiste ? », affirma le candidat libéral. (11)

Pour le PLC, M. Duceppe n’a donc d’autre choix que de révéler l’identité de ce « militant de bonne foi » qui est à l’origine de la présence M. Pantaloni à cette réunion. Ce qui était peine perdue.

Ironiquement, si M. Duceppe refuse de donner le nom de celui qui invita M. Pantaloni à la réunion du BQ, il est pourtant souvent le premier à demander des noms lorsque ce sont ses rivaux politiques qui se retrouvent dans l’embarras.

Ainsi, suite au dépôt du premier rapport de la commission Gomery, le 1er novembre 2005, M. Duceppe exigeait du premier ministre Paul Martin qu’il rende public les noms de ceux qui reçurent de l’argent sale provenant du programme des commandites.

Puis, lorsque éclata la controverse entourant une des premières publicités électorales du Parti libéral du Canada, dans laquelle le concept de la Ligue nationale d’improvisation fut copieusement plagié, M. Duceppe était encore une fois le premier à réclamer des noms !

Quand il fut révélé que le concepteur de ladite publicité, M. Marc-André Rivard, était un ancien directeur créatif de la firme Groupaction, et qu’il siégeait sur un comité publicitaire du PLC composé d’une vingtaine de personnes qui ne tiennent pas particulièrement à être identifiées sur la place publique, la curiosité de M. Duceppe n’en fut que plus aiguisée. (12)

« J’aimerais que les libéraux nous disent qui donc forme ce comité », s’est alors exclamé M. Duceppe. « Qui siège sur ce comité, qui sont-ils? D’où viennent-ils? Quels liens ont-ils? » Voilà autant de questions auxquelles le chef bloquiste exige une réponse. Conscient qu’il est peu vraisemblable qu’il obtienne satisfaction, le chef bloquiste ajouta : « Quand on ne veut pas dévoiler les noms de ceux qui sont là, il y a certainement un malaise. » (13)

M. Duceppe semble certainement très bien placé pour le savoir, lui qui, à peine deux semaines plus tôt, refusait obstinément de donner le nom du militant du Bloc qui avait invité M. Pantaloni à siéger à la rencontre de son propre comité électoral.

Enfin, dans l’affaire des fuites entourant l’annonce du ministre libéral Ralph Goodale relativement aux fiducies de revenu, M. Duceppe était une fois de plus en train de demander des noms lorsqu’il fut révélé qu’une réunion avait lieu au bureau de M. Goodale avec des investisseurs financiers dans les heures précédent l’annonce du ministre, le 23 novembre 2005.

« Moi, j’aimerais savoir le nom des courtiers qui étaient présents à cette rencontre avec Ralph Goodale le 23 au matin », déclara M. Duceppe. « Et Paul Martin doit exiger que Ralph Goodale nous donne ces noms. » (14)

Dis-donc, Gilles, comment ça se fait qu’il n’y a que toi qui a le droit d’exiger des noms ?

Pourquoi tu ne donnerais pas l’exemple avant de demander aux autres de faire ce que tu as toi-même refusé de faire ?

Réponse suggérée du Bureau des Affaires Louches : parce dans tous les partis, y compris de toute évidence dans le Bloc, il existe des choses et des gens dont on préfère taire l’existence.

C’est aussi simple que ça.

D’ailleurs, si M. Pantaloni a vraisemblablement été banni des réunions du comité électoral de M. Duceppe, il y a fort à parier que le militant de « bonne foi » qui avait eu l’idée de l’inviter aura réussit à lui trouver un rôle plus discret pour cet « indispensable » organisateur politique.

Sources :

(9) La Presse Canadienne, « Duceppe mis dans l’embarras par la présence d’un ex-fraudeur dans ses bureaux », par Sylvain Larocque, 30 novembre 2005.
(10) http://www.qc.liberal.ca/fr/presse/communiques.aspx?ID=502
(11) La Presse, « Affaire Pantaloni », par Denis Lessard et Nathaëlle Morissette, 1er décembre 2005.
(12) La Presse, «  L’idéateur de la pub du PLC est un ancien vice-président de Groupaction », par André Noël, 13 décembre 2005.
(13) Le Devoir, « Duceppe veut des noms », par Presse Canadienne, 14 décembre 2005.
(14) SRC Radio - Bulletin National et International, par Mireille Massé, 2 janvier 2006.
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